CÔTE D’IVOIRE : NOTES DU GROUPE PARLEMENTAIRE PDCI-RDA SUR LE PROCESSUS ELECTORAL : COMMISSION ELECTORALE INDEPENDANTE, LOI ELECTORALE, IDENTIFICATION ET ENRÔLEMENT ELECTORAL, DECOUPAGE ELECTORAL

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I – NOTE SUR LA COMMISSION ÉLECTORALE INDÉPENDANTE

I – 1 – OBSERVATIONS

  • Déséquilibre :

Le RHDP actuellement au pouvoir est sur-représenté dans la Commission Centrale, organe décisionnaire, ainsi que dans les commissions locales.

A l’analyse, dans les faits, 15 membres de la Commission Centrale sont désignés par le Parti au pouvoir contre 3 pour les Partis de l’opposition (PDCI-RDA, PPA-CI, FPI) ;

Des partis politiques sans représentation aucune au parlement ou dans les collectivités locales sont représentés dans la commission centrale et dans les commissions locales ; ces partis ne sont en réalité que les bras séculiers du RHDP pour orienter toutes les décisions de la CEI en sa faveur.

Le CNDH (Conseil National des Droits de l’Homme) qui est représenté à la Commission Centrale a un agrément pour faire l’observation des élections.

  • Indépendance :

Le Président de la République, Président d’un parti politique a un représentant à la Commission Centrale.

 

Le Ministre de l’Intérieur, membre du Gouvernement ainsi que les préfets et les sous-préfets qui agissent au nom du Président de la République sont également membres de la Commission Centrale ainsi que des Commissions Locales.

 

  • Retours d’expériences électorales :

Les retours d’expériences des dernières élections locales ou présidentielles dénotent clairement du fait des deux observations citées plus haut :

  • Il est, aujourd’hui, prouvé que 100% des membres du corps préfectoral ont voté en faveur des candidats au poste de Président des Commissions Électorales Locales (CEL) membres du RHDP et 99,97 % ont voté en faveur des candidats RHDP au poste de Vice-présidents des CEL.
  • La CEI est complice activement de la manipulation des résultats électoraux en faveur des candidats proches du pouvoir;
  • Les documents de vote produits par la CEI ne sont pas sécurisés (absence de sticker) ;
  • Le mauvais fonctionnement des appareils d’identification des électeurs à l’intérieur des bureaux de vote facilitant ainsi le bourrage des urnes ;
  • La publication de résultats électoraux parfois non conformes à la réalité du vote ;
  • Le développement de la corruption dans le processus électoral et plus particulièrement pendant les dépouillements et dans la publication des résultats

 

I – 2 – QUELQUES PROPOSITIONS D’ORIENTATION

  • Rééquilibrage :
  • Participation des partis politiques ayant des élus au parlement pour la Commission Centrale ;
  • Participation des partis politiques ayant des élus au parlement ou dans les collectivités locales pour les CEI locales ;
  • Retrait d’organisations de la société civile proche du parti au pouvoir
  • Équilibrage pour décisions consensuelles.

 

  • Indépendance :
  • Réduction de l’influence du Président de la République, du Gouvernement ainsi que de leurs démembrements dans les CEI locales ;
  • Nomination par appel à candidatures des dirigeants de l’exécutif de la CEI par une commission mixe du parlement.

 

  • Retours d’expériences électorales :
  • Nouveaux outils fiables de suivi des élections dans les bureaux de vote ;
  • Sanctions pénales des agents responsables de la CEI, des CEL et des Bureaux de votes ;
  • Réforme du Code électoral pour une CEI plus indépendante.

 

 

II – NOTE SUR LA LOI ELECTORALE

 

II – 1 – OBSERVATIONS

  • Indépendance :
  • Toutes les décisions de la CEI sont sous le contrôle du Gouvernement ; à titre d’exemple, il est indiqué dans le code électoral :
  1. Article 22 alinéa 2 : « les spécifications techniques ainsi que le nombre des affiches, enveloppes et bulletins de vote sont fixées par décret pris en Conseil des Ministres sur proposition de la Commission chargée des élections ».
  2. Article 23 alinéa 3 : « les conditions d’établissement de la liste des imprimeurs sont fixées, sur proposition conforme de la Commission chargée des élections, par décret pris en Conseil des ministres »

Il en est ainsi par exemple de :

  • La fixation de la période d’établissement de la liste électorale ainsi que des modalités pratiques de son exécution ;
  • Des modalités d’établissement de la carte d’électeur.
  1. Absence d’autonomie financière

 

 

  • Poursuite pénale :
  • Les membres de la CEI ne prennent aucun engagement et ne peuvent faire l’objet de poursuite pénale dans le cas où ils posent des actes non conformes au respect de la Loi électorale
  • Les auteurs d’actes de corruption avérée pendant le processus électoral ne font l’objet d’aucune poursuite pénale ;

 

  • Proclamation des résultats :
  • Les processus de dépouillement et de proclamation des résultats par bureau de vote ne sont pas très bien élaborés et laissent la porte ouverte à la manipulation sur place ou dans les étapes intermédiaires avant la proclamation définitive.

 

  • Parrainage :
  • Le parrainage fait l’objet de critiques des partis de l’opposition du fait d’un manque de confiance en la CEI. Les arguments avancés pour le rejet de certaines candidatures prêtent à des doutes quant à leur sincérité.

 

  • Retours d’expériences électorales :
  • La CEI est activement complice de la manipulation des résultats électoraux en faveur des candidats proches du pouvoir;
  • Le mauvais fonctionnement des appareils d’identification des électeurs à l’intérieur des bureaux de vote facilitant ainsi le bourrage des urnes ;
  • La publication de résultats électoraux parfois non conformes au vote ;
  • Le développement de la corruption dans le processus électoral et plus particulièrement dans la publication des résultats
  • La signature des procès-verbaux avant le début du vote ;
  • La non proclamation des résultats devant les électeurs par Bureau de vote ;
  • L’ouverture tardive ou la fermeture anticipée des Bureaux de vote.

 

II – 2 – QUELQUES PROPOSITIONS D’ORIENTATION

  • Indépendance :
  • Rendre la CEI plus indépendante dans ses décisions techniques
  • Décisions du Gouvernement après avis conforme de la CEI

 

  • Poursuite pénale :
  • Engager la responsabilité pénale des membres du bureau de vote en cas de non-respect des clauses du processus électoral ;
  • Engager la responsabilité pénale des candidats

 

  • Proclamation des résultats :
  • Renforcement de la proclamation des résultats par Bureau de vote qui seuls doivent faire foi ; les résultats doivent être sécurisés par la Blockchain technologie. Les compilations intermédiaires le sont à titre informatif.

 

  • Parrainage :
  • Abandon du parrainage

 

  • Retours d’expériences électorales :
  • Nouvel outil de comptage des électeurs opérationnel et fiable ;
  • Mise à disposition des listes électorales avec photos à tous les membres des Bureaux de vote.

 

 

III – NOTE SUR L’IDENTIFICATION ET L’ENRÔLEMENT ELECTORAL

 

III – 1 – OBSERVATIONS

 

  • Identification en vue des élections :

 

Pour une population estimée à 29 Millions d’habitants (Recensement Général de la Population et de l’Habitat 2021), la population électorale est seulement de 8 Millions, soit 27,6% de la population. Avec un taux de participation moyen de 40% ; seuls 11% des ivoiriens font aujourd’hui et devraient faire les choix politiques de la Nation, ce qui n’est pas le reflet d’une Démocratie.

 

Si l’on s’en réfère à la moyenne sous régionale de la population électorale qui est de 40% de la population locale, la population électorale de la Côte d’Ivoire devrait être au moins de 12 Millions d’électeurs, soit un gap de 4 Millions de nouveaux électeurs à combler pour que les résultats des prochaines élections en Côte d’Ivoire puissent refléter un scrutin démocratique.

  • Enrôlement électoral :

 

La révision de la liste électorale 2024 a été imposée unilatéralement par la CEI et le Gouvernement pour une période de 30 jours allant du 19 Octobre 2024 au 17 Novembre 2024, sans concertation préalable avec l’ensemble des Partis politiques et la société civile. Cette révision qui devait se faire chaque année est faite en réalité tous les 5 ans ; ce qui n’est ni techniquement, ni objectivement réalisable et revient à un « passage en force ».

 

Cette méthode, avec une limitation dans la durée de l’enrôlement électoral, n’a produit entre 2020 et 2022 que 500.000 électeurs ; ce qui est largement en deçà des objectifs à atteindre pour un processus électoral crédible en Côte d’Ivoire.

Mon collègue fera tout à l’heure une analyse détaillée des résultats finaux de la RLE 2024.

 

  • Liste électorale existante :

 

La liste électorale dans son état actuel n’est plus fiable avec son lot d’informations caduques (présence de milliers de décédés, de double inscription, de mères comptabilisant des dizaines voire des centaines d’enfants, etc).

L’Opposition qui a toujours dénoncé la qualité de cette liste électorale exige un audit de celle-ci. Par audit elle entend :

 

Au niveau central :

–           L’analyse des données statistiques par tranches d’âges ;

–           La détection des doublons et des incohérences ;

–           La vérification des documents administratifs ayant servi à l’inscription sur la liste électorale.

 

Au niveau local :

–           La détection des personnes décédées.

 

 

III – 2 – QUELQUES PROPOSITIONS D’ORIENTATION

 

Nos propositions pour la RLE 2025 sont contenues dans notre déclaration sur la question.

 

  • Sur l’audit de la liste électorale existante :

 

–           Engager par l’intermédiaire d’un organe indépendant mandaté à cet effet, l’audit de la liste électorale sur la base d’un cahier de charges validé par toutes les parties en présence.

–      assurer le suivi de cette importante mission par un comité de contrôle et de suivi au sein même de la CEI. Les membres de ce comité pourraient être recrutés par appel à candidatures.

 

 

IV – NOTE SUR LE DÉCOUPAGE ÉLECTORAL

 

IV – 1 – OBSERVATIONS

Les critères généralement allégués pour le découpage électoral seraient : la population, le pays rural et la superficie. Les proportions seraient respectivement de 55% (Population), 20% (Pays rural), 25% (Superficie) ou 75% (Population) et 25% (superficie). Ces critères ne reposent sur aucun texte juridique hormis la volonté des gouvernants.

Le nord avec moins du tiers de la population, compte plus du tiers des sièges électoraux du pays.

Cette pratique en cours conduit à un découpage inéquitable et déséquilibré dont les disparités sont criantes. A titre d’exemple sur la base du fichier électoral des élections législatives de Mars 2021, les 11 régions du Nord, avec une population électorale de 1 281 303 électeurs, disposent de 72 sièges de député contre 31 sièges pour une population électorale de 2 051 399 électeurs dans le District d’Abidjan.

L’ensemble des autres régions du pays ne totalise que 152 sièges de député avec une population électorale de 4 049 377 électeurs. Quand on sait que les circonscriptions du Nord constituent un « bastion ethnique » quasi- exclusif du RHDP, parti au pouvoir, le jeu démocratique se trouve ainsi totalement faussé avec une Assemblée nationale aux mains du pouvoir en place qui ne reflète nullement la réalité sociologique de la Côte d’Ivoire.

 

IV – 2 – QUELQUES PROPOSITIONS D’ORIENTATION

 

Les Partis de l’Opposition ont recommandé un redécoupage électoral plus équitable et plus équilibré, avec un critère qui s’applique égalitairement à toutes les circonscriptions.

Une proposition consisterait à préserver les acquis actuels, avec un réajustement sur la base de 1 siège pour 22 000 électeurs en moyenne, avec pour conséquence l’augmentation du nombre de députés.

Une autre proposition consisterait à partir du nombre actuel de députés, à privilégier un équilibre sur la base de la population uniquement.

Cette question cruciale qui est au centre du fonctionnement démocratique des Institutions de la République serait également abordée dans le cadre d’un dialogue politique inclusif.

 

Pour conclure, le Groupe Parlementaire PDCI-RDA à l’Assemblée nationale voudrait informer l’opinion nationale et internationale du fait qu’après cet important travail d’analyse et de recherche de solutions aux problèmes posés par les questions électorales en Côte d’Ivoire qu’il dispose aujourd’hui de deux propositions de lois sur la réforme de la CEI ainsi que de la LOI électorale.

Ces propositions de Lois constituent des contributions à faire dans le cadre du dialogue politique qui se mettra en place. Elles ont été élaborées dans le seul objectif d’apporter une valeur ajoutée à la construction de la démocratie et de la paix dans notre pays.

La question de la proclamation des résultats des élections, bureau de vote par bureau de vote, pourrait à elle seule faire l’objet de la présentation détaillée du processus de dépouillement des voix à la proclamation des résultats pour chaque bureau de vote.

 

Fait à Abidjan, le 20 janvier 2025

Le Groupe parlementaire PDCI-RDA